Ces temps-ci, je suis dans la lecture sérieuse et je constate que nous vivons dans une ère complètement changée par rapport aux dernières années du XXe siècle.
Évidemment, nous sommes maintenant au XXIe siècle et la technologie nous oblige à évoluer. Cependant, la société nous force aussi à consommer… c’est l’ère du jetable comme l’ère des communications, mais on ne communique pas les yeux dans les yeux… on texte… on Skype…. on courriélise, on iPhone…
Je me suis dit que j’allais pour quelques semaines, revenir à une base plus rétro mais combien plus réconfortante… sinon pour vous, peut-être pour moi. Ainsi, je vais vous parler de choses qui ne font plus les manchettes, mais qui pourraient peut-être vous permettre de méditer sur là où nous allons aujourd’hui.
Je veux donc vous parler de foi.
Dans ma jeunesse, à la fin des années 1940, le Québec était profondément religieux.
L’Église exerçait un pouvoir immense sur toute la vie quotidienne des Québécois.
Le pouvoir religieux l’emportait sur le pouvoir politique.
En effet, les politiciens n’avaient d’autres choix que de laisser une place immense à l’Église s’ils voulaient être élus.
L’Église contrôlait ses fidèles et avait un fort ascendant sur eux.
Elle dictait fermement la direction que devaient prendre ses ouailles.
La situation était différente selon que l’on habitait la grande ville ou la campagne.
Les gens de la ville avaient une tendance libérale alors que les cultivateurs avaient plutôt un faible pour le conservatisme.
Mais au-delà des foudres de l’Église qui incitaient les plus peureux à voter selon les consignes, les promesses des politiciens offraient aussi beaucoup d’intérêts. Ces offres changeaient souvent la décision des voteurs une fois rendus dans l’isoloir, à l’abri du regard accusateur de Monsieur le Curé.
Les bouts de routes asphaltées, les « frigidaires », les petites terres à bois ou encore un « job » au gouvernement ou dans la police provinciale du temps, gagnaient fréquemment des votes aux audacieux politiciens.
L’Église affirmait aux paroissiens: « Le Ciel est bleu, l’enfer est rouge ».
Dans ces temps-là, l’Église contrôlait aussi l’enseignement.
Toutes les écoles canadiennes-françaises étaient catholiques et l’enseignement religieux tenait une place très importante.
Entre autres, on y enseignait le petit catéchisme. Tous les québécois nés avant 1960 se souviennent d’avoir dû apprendre par coeur ce petit catéchisme renfermant les prières pour toutes les occasions, les actes et les 508 questions, dont la première était:
» Qui est le créateur du monde? »
Des 10 commandements de Dieu aux 7 commandements de l’Église, des 7 péchés capitaux aux valeurs morales, nous retrouvions les 3 vertus théologales que sont la foi, l’espérance et la charité. Elles se définissent comme suit:
Foi: le fait de croire en Dieu et en des vérités révélées par l’Église.
Espérance: vertu par laquelle on attend de Dieu, sa grâce et la vie éternelle
Charité: vertu qui porte à vouloir et à faire du bien aux autres, à aimer Dieu et son prochain comme soi-même.
Pour ma part, bien que mon intérêt pour la religion se fût élimé avec la révolution tranquille, imitant en cela une grande majorité de québécois francophones de souche canadienne-française, j’ai toujours eu ces trois vertus en tête.
Elles représentent à mon avis, la base de la morale de tout individu, quelles que soient ses allégeances religieuses.
Je voudrais donc partager ma compréhension de ces vertus.
Il me semble essentiel de les ramener à la mode en ce nouveau millénaire, alors que nous assistons à de plus en plus de violence, de crimes contre les individus et la propriété.
Les valeurs fondamentales manquent à une grande partie de la société.
Ceci conduit les individus à un laxisme et un je-m’en-foutisme qui laisse sous-entendre qu’il est préférable de se mêler de ses affaires et de penser d’abord à soi. L’individualisme à outrance que l’on connaît depuis plusieurs années est sûrement une des sources les plus importantes de la dégradation du tissu social.
La foi déplace les montagnes selon un vieux proverbe.
Déjà d’y croire demande une foi exceptionnelle.
Il est donc évident que croire demande au préalable d’avoir la foi.
C’est un peu difficile à comprendre.
La foi est dogmatique, elle consiste en la conviction profonde qu’une chose existe sans pour cela détenir des preuves concrètes de cette existence. Du point de vue religieux, croire en Dieu c’est avoir la foi. La foi, n’est pas qu’associée à la religion.
Il nous faut dans la vie, avoir foi en une multitude de choses.
Nous vivons dans une société libre et capitaliste qui est elle-même basée sur la foi.
Il n’y a pas plus croyant que les québécois.
Il n’y a pas plus victimes de fraudes que les québécois aussi.
Mais qu’importe, il apparaît fondamental à presque tous les québécois nés ici que la foi soit omniprésente dans leur vie quotidienne.
Le simple fait de ne plus croire qu’ils peuvent et doivent faire confiance aux autres leur est si difficile à supporter qu’ils relèguent cette idée dans leur subconscient et ne veulent pas en entendre parler.
Qui de nous prend la peine de vérifier s’il a reçu correctement la monnaie de sa pièce lorsqu’au dépanneur ou à l’épicerie, il achète des items qu’il paye comptant avec un billet de banque largement supérieur au coût de ces mêmes items.
Qui vérifie point par point, les montants s’additionnant sur une facture de restaurant à la fin d’un repas copieux, largement arrosé. Combien d’entre-nous ont signé une copie de carte de crédit sans même avoir véritablement remarqué le montant que le préposé avait inscrit sur cette fiche? Nous avons foi en notre prochain, convaincu que le magasin, le restaurant ou qui que ce soit avec qui nous transigeons, ne saurait commettre une fraude, encore moins une erreur de calcul ou de transcription.
Nous croyons à toutes les promesses électorales qui nous sont faites.
Mêmes si de nos jours la majorité des gens qualifient les politiciens de menteurs et de malhonnêtes, ils les élisent quand même et leur confient la gestion de milliards de dollars par année. Où va tout cet argent qu’ils disent gérer consciencieusement et efficacement?
Sait-on par exemple, à quoi sert depuis plus de 30 ans l’argent des profits de Loto-Québec? Ces profits faramineux ont-ils permis aux gouvernements qui se sont succédé depuis 1967, de baisser les impôts, de fournir de meilleurs services à moindre coût?
La gestion de ces argents est-elle aussi efficace qu’elle le devrait?
Le Vérificateur du Gouvernement n’a de cesse de souligner les dépenses inutiles chaque année sans que pour cela quiconque intervienne. Les scandales se sont perpétués depuis toujours sans que jamais il y ait de suite ni de correctif qui auraient permis vraiment d’éliminer ces fraudes ou ces écarts de conduite. Le pays sombre dans les dettes incontrôlables et même aujourd’hui, la seule manière que nos dirigeants choisissent pour résoudre cette impasse consiste à faire encore payer les petits, les plus démunis et la classe moyenne. Les pauvres s’appauvrissent de plus en plus et les riches s’enrichissent de plus en plus.
Le fait que les millionnaires puissent transférer dans des paradis fiscaux. des milliards de dollars et ne pas payer d’impôts sur ces montants au Canada ou encore qu’un Ministre des Finances, propriétaire d’une flotte de bateaux puisse faire battre pavillon à ses navires dans d’autres pays pour éviter l’impôt n’est-il pas suffisant pour que les électeurs n’élisent jamais plus de tels individus?
Pourtant, les partis d’oppositions dénoncent ces abus et les journalistes s’en emparent pour les publier dans les journaux écrits et les crier fort sur les réseaux électroniques de radios et télévisions. Ils tombent dans l’oubli quelques jours plus tard.
La mémoire est-elle si courte que cela?
Nous savons cependant que les partis de l’opposition ne sont pas si nombreux.
Ces derniers seront un jour de retour au pouvoir et qu’ils n’ont pas intérêt à crier plus fort qu’il ne le faut, du moins, pas plus longtemps qu’il ne le faut.
Non! suffisamment pour dénoncer la situation en espérant faire assez de tort à l’adversaire dans un court laps de temps pour que l’électorat vote différemment la prochaine fois. Je persiste à croire que la foi est essentielle et qu’elle est une vertu exceptionnelle, mais doit-elle être aveugle? Combien d’hommes et de femmes ont eu à regretter d’avoir fait confiance à leur conjoint, leur associé ou un conseiller alors que dans leur dos, ce même conjoint, associé ou conseiller s’en donnait à coeur joie. Une vérification positive éloigne les prochaines, disais-je à mes adjoints quand je travaillais dans l’organisation qui m’a permis de gagner ma vie durant 30 ans. Certains osaient me dire que je manquais de confiance en eux. Je répondais que je me devais de procéder à quelques vérifications à l’occasion car une confiance aveugle n’était jamais permise envers qui que ce soit.
La confiance se gagne petit à petit, elle peut aussi être accordée d’emblée, si au premier contact, nous avons le sentiment que cela est possible, mais jamais cette confiance doit être aveugle. Le fait de contrôler et de réaliser que tout est conforme à nos attentes nous permet d’espacer les vérifications ou de les mieux sélectionner, mais ne jamais les abolir totalement. Encore plus avec des gens que nous ne connaissons pas et que nous rencontrons pour la première fois comme les serveurs dans les restaurants ou les vendeuses dans les magasins. Il est tout à fait justifié de vérifier la facture qu’ils nous présentent et nous assurer de l’exactitude des montants qu’ils y notent.
Voilà ce qui en est de la foi envers notre prochain. Plusieurs individus ayant une foi inébranlable envers les autres, n’ont pas le dixième de cette foi envers eux-mêmes. Ils font confiance aveuglément à n’importe qui mais ne croient pas en leur propre valeur. Avoir foi en ses capacités, sa valeur, constitue une part importante des ingrédients de la recette du succès. Croire en ses propres moyens pour réussir, est fondamental mais il faut que ces moyens soient valables et que les autres y croient aussi. De plus, il est nécessaire de croire en la vie, de croire qu’il peut nous arriver toutes sortes de belles choses et qu’il n’y a pas de raisons pour que nous ne soyons pas gâtés par la vie.
Il faut croire que nous atteindrons nos objectifs. Les objectifs, contrairement à la chance, sont des choses que nous contrôlons. Plein de gens croient que la réussite tient à la chance. Pour 1% de chance il y a 99% de sueur dans tout projet. Rien n’arrive à ceux qui s’assoient sur leur cul. Pour qu’un rêve se réalise il doit être réalisable et on doit s’y astreindre. Le vouloir ne suffit pas, il faut y travailler et très fort. La chance sourit aux audacieux, mais le succès n’atteint que ceux et celles qui font tout ce qu’ils doivent pour y parvenir.
Un proverbe américain dit: « Le succès est une échelle dans laquelle on ne peut pas monter les mains dans les poches ».
Pour ma part, j’ai toujours cru que je pouvais réussir.
Bien que je n’aie jamais eu l’exemple de la part de mon père, sa méthode d’éducation m’a incitée à vouloir réussir à tout prix.
Il ne me faisait pas confiance; il disait souvent:
– » C’est pas de même, donnes-moi donc ça je vais le faire. »
Son attitude m’incitait, dans ma jeunesse, à lui laisser faire tout le travail lui-même.
J’en étais même venu à le manipuler sans qu’il s’en rende compte.
Quand il m’assignait une tâche que je n’aimais pas et qu’il m’observait, je faisais exprès pour mal m’y prendre.
Ainsi, il s’emportait et faisait le travail à ma place, désireux de me montrer à quel point il savait s’y prendre.
Sa méthode a incrusté cependant chez-moi, le besoin viscéral de vouloir prouver à tout prix, à tout le monde, que j’étais capable de tout. Le moins que je puisse dire c’est que j’avais acquis dès le plus jeune âge, le sentiment de pouvoir réussir tout ce que j’entreprendrais. C’était faux évidemment. Je visais beaucoup trop haut en me mettant çà en tête, mais mon père ne me laissait pas le choix de penser autrement et pire, ne m’enseignait pas à voir les choses différemment. Il en est résulté que j’ai cru dans mes rêves d’enfant et persisté à penser que rien n’était impossible et surtout que j’étais parfaitement capable de tout. Ce que je détestais chez mon père, son attitude de « ti-jos-connaissant », je l’intégrais toutefois en moi, petit à petit sans m’en rendre compte. Il m’a fallu du temps pour comprendre et modifier mon approche, mais la sagesse est difficile à atteindre. Je terminerai ce texte en vous laissant sur ces quelques pensées glanées à travers mes nombreuses lectures. Malheureusement, je ne sais pas toujours quelle fut la personne à y penser la première, mais peu importe, ce qui compte c’est d’en prendre connaissance.
– La foi, c’est de croire qu’il existe un océan parce qu’on a vu un ruisseau.
– J’aime ceux qui rêvent l’impossible. (Goethe 1832)
– Avoir la foi, c’est aussi faire confiance à d’autres capacités que les siennes. ( Pierre Trépanier)
– L’Homme est aussi jeune que sa foi et aussi vieux que ses doutes.
À bientôt….